Tequila
Le berceau de la boisson nationale mexicaine
« Jarabes - Classico »
La boisson la plus populaire du Mexique est la « Tequila ». C'est un nom masculin et quand on commande un verre, il faut dire « un téquila » ! (avec un « é » en français, mais un « e » en espagnol). C'est aussi une ville qui a donné son nom au puissant breuvage. Elle est située à une cinquantaine de kilomètres à l'est de Guadalajara (le mot le plus difficile à prononcer de la langue espagnole !) et il faut une heure de bus pour y aller. On peut aussi prendre le Tequila-Express, un train pittoresque qui propose un voyage moins agité, mais rassurez-vous, on y arrive... La ville est petite mais concentre à elle seule la production mondiale du fameux alcool. Il suffit de monter sur les hauteurs qui dominent la ville pour voir les distilleries et les compter. Il y en a une vingtaine. On peut les visiter.
La plus belle et la plus fameuse est celle de « Cuervo » (le Corbeau). La distillerie date du XVIIIe siècle et ressemble à ces grandes haciendas que l'on peut voir parfois dans les westerns. En entrant, vous serez accueillis par un corbeau austère emprisonné dans sa cage. Dans la grande halle, d'allure coloniale, un guide vous attendra pour vous faire visiter les installations qui n'ont pas changé depuis 200 ans. Enfin, peut-être moins. C'est un véritable musée en activité. Vous y découvrirez la méthode employée pour fabriquer l'alcool le plus réputé du pays. On pense généralement que la tequila est une boisson bon marché et qu'on la fabrique un peu partout au Mexique. En réalité, il n'y a qu'à Tequila que l'on fait de la tequila. Il en va comme des crus en France.
L'agave, qui est la cactée qui la produit, ne pousse que dans une petite région de moins de 100 km carré autour de la ville. Seule cette région conjugue à la fois la meilleure terre et le meilleure ensoleillement pour l'épanouissement de la plante. Il faut dire que la fleur de l'agave, appelée « Tequilero », est fécondée par un seul animal que l'on ne trouve qu'ici : une chauve-souris du nom de « Leptonycteris curasoae », appelée au Mexique le « Murciélo narigudo ». On peut cependant trouver dans l'état du Michoacán et dans la région de Guanajuato des distilleries de tequila mais elles n'égalent pas la qualité des tequila du Jalisco.
Les champs d'agaves s'étendent à perte de vue, donnant au paysage cette couleur vert-bleu si caractéristique. On ne la récolte qu'après 12 ans de culture. Après, elle fleurit et s'élève jusqu'à 10 m de haut et ne donne plus rien. Une fois récoltée, l'agave est dépouillée de ses feuilles, on n'en garde que le cœur, comme pour un artichaut. On les enfourne en grande quantité dans une grande étuve, où les noyaux, mis sous vapeur pendant 48 heures, vont se gorger d'eau. La photo montre cette étape.
Déjà, une odeur subtile se dégage... Le cœur est broyé et on en recueille le jus encore fumant pour le distiller une première fois. La première qualité est appelée « Claro », elle est transparente. C'est celle que l'on trouve généralement partout dans le monde. La seconde, deux fois distillée, est appelée « Especial ». Elle a une couleur ambrée et une odeur très parfumée qui contraste avec la « Claro ». Cette tequila nommée aussi « Dorado » ou surtout « Reposado », c'est une tequila blanco que l'on a fait reposer moins d'un an dans des barriques de chêne. Le guide peut vous faire goûter les différents pressages. La troisième, la plus chère et la plus rare (on ne la trouve que difficilement en Europe), c'est l'« Añero », celle qu'on ne fait qu'une fois par an et qui ensuite repose dans des fûts de chêne pendant plus d'un ans. Je ne l'ai pas goûtée mais ce doit être un nectar. la tequila se consomme sèche, mais on l'aime surtout avec un peu de sel et de citron. On dépose le sel entre le pouce et l'index, on le porte à sa bouche et on en imprègne le bout de sa langue. Rapidement, on boit le verre « cul-sec » en basculant la tête en arrière. On prend ensuite le citron que l'on suce plus ou moins lentement. C'est tout un art mais ça vaut le détour. Une bonne tape dans le dos et on peut en reprendre un autre.
Mais attention ! L'alcool est à consommer avec modération, surtout ici, où le climat est assez torride. Il faut dire que l'on peut acheter des petites bouteilles de 25 cl, ce qui est très pratique lors des longs voyages en transports en commun où l'on s'ennuie parfois un peu. Les ouvriers des chantiers, eux, préfèrent une tequila meilleur marché que l'on peut acheter en bidon plastique et qui peuvent atteindre 50 litres de contenance ! Je ne résisterai pas pour vous donner, d'après quelques amis du Mexique, le nom des meilleurs tequila connues (mais qu'il n'est pas toujours facile de trouver en Europe) :
« Don Julio » « Herradura reposado » « Cazadores » « Reserva del Patron » Jimador Orendain Pueblo ViejoBizarrement, « Agave » est un mot grec qui signifie « admirable ». Ce n'est pas un hasard et la tequila qui en est la substantifique quintessence en apporte la preuve par ses nombreux bienfaits : dans les années 1930, les docteurs mexicains avaient l'habitude de la prescrire aux patients qui avaient attrapé un coup de froid ! Mais on sait aussi qu'elle permet de lutter contre le mauvais cholestérol, de soulager les douleurs ou tout simplement à perdre du poids !
Quant à son origine et sa commercialisation, seuls deux autres états ont le droit d'utiliser l'appellation « Tequila » : le Nayarit et le Tamaulipas. Ailleurs, si l'on fabrique un produit similaire, on ne peut l'appeler que « Mezcal », reconnaissable au petit ver (« le gusano ») qui se trouve au fond de la bouteille. La différence de goût est évidente. Le mezcal est souvent fumé, ce qui lui donne ce goût particulier de caoutchouc brûlé lorsqu'il est bas de gamme. Les meilleurs proviennent de la région de Oaxaca, dont le fameux « Hornitos » ( qui veut dire en espagnol : le frelon...).
Les indiens connaissaient déjà l'agave. Il savait la fermenter pour obtenir l'« Octli », souvent appelé « Pulque ». Comme dans d'autres parties du monde, l'alcool a toujours été un moyen efficace de se rapprocher des dieux. Les Aztèques consommait le pulque mais déjà avec modération. En abuser pouvait conduire à la mort ! Si un jeune homme apparaissait ivre en public, si on le surprenait à boire du pulque ou gisant dans la rue ou chantant en compagnie d'autres soûlards, si c'était un « macegual »; il était battu à mort ou garrotté devant tous les autres jeunes de la ville. Cela pour servir d'exemple et apprendre à la jeunesse à se préserver de l'ivrognerie. La loi était plus sévère pour les nobles que pour le peuple. L'homme ordinaire était simplement réprimandé la première fois qu'il était surpris en état d'ivresse. Mais ses biens et sa maison étaient confisqués car « celui qui perd l'esprit n'est pas digne de posséder une maison mais doit vivre dans la nature comme les bêtes sauvages ». La seconde fois, c'était la mort assurée. Ce n'est que devenu vieux, ou vieille, que l'on pouvait s'adonner à ce vice. Et encore, seulement pendant les fêtes officielles... A la vue d'une telle sévérité, on est bien obligé de conclure que les étaient assez « portés sur la bouteille ». Curieusement, la déesse de l'agave, « Mayahuel », était, selon la légende, la mère attentionnée de 400 enfants et possédait bien sûr le nombre nécessaire de mamelles pour les nourrir...
On consomme toujours le pulque au Mexique. C'est un peu le vin traditionnel du pays. Il s'élabore toujours de la même manière. Avant qu'elle ne soit en fleur, le paysan que l'on nomme « Tlachiquero », récupère le jus d'agave, en coupant ses extrémités. Le suc, un jus blanchâtre, s'en écoule. On récupère ce jus tout au long de la journée. Il est collecté dans une calebasse où il fermentera pendant 24 heures. On obtient une boisson rafraîchissante qui ne compte que 6 degrés d'alcool et qui est couramment consommée. C'est à essayer. Si vous voyez une boutique louche portant le nom de « Pulqueria », vous sauraient quoi y trouver...
Incroyable... mais vrai !
On découvre de nouvelles vertus à la Tequila...